Cette semaine sans réseaux sociaux m’a permis de faire ce qui me venait dans l’ici et maintenant sans être trop dirigée par le monde extérieur. Et en même temps, difficile de s’y soustraire totalement : je remplis mes attestations pour sortir aller acheter les “objets de première nécessité” et je continue à réfléchir à ce que cela nous fait vivre et à l’après.
Loin des réseaux sociaux pendant une semaine
La semaine dernière, j’ai décidé de ne plus me connecter aux réseaux sociaux pour voir ce qui se passerait en moi. Il est vrai que depuis le début du confinement, cela me permet d’être en lien avec les petites choses qui seraient peut-être passées inaperçu dans nos vies trépidantes, les productions créatives des uns et des autres sur notre vécu.. Bref des moments de vie partagés – au détriment des moments de vie vécus ?
Ce qui m’a le plus marqué, c’est que je n’avais presque plus de contenus qui m’était proposé (à part quelques collèges-amies, que je remercie, qui m’envoient des articles sélectionnés), alors que j’avais envie de réfléchir, de comprendre, d’imaginer, d’approfondir… J’avais besoin de matière pour alimenter mes propres pensées.
J’ai entrepris de rassembler tous les “philosophie magazine” de la maison et j’ai passé une heure par jour environ à lire les articles dont le titre ou l’auteur m’attiraient. C’était très satisfaisant de prioriser par rapport à ce que je ressentais dans l’instant présent : cet article plutôt maintenant, celui-là, intéressant dans l’absolu mais plus tard.
J’ai eu quelques moments de vague à l’âme (plus forts ou plus conscients peut-être ?) avec cette prise de conscience que je ne retravaillerai pas avant longtemps (les gestes barrière dans le massage…) alors que les objectifs même du Gestalt massage pourraient accompagner ces moments difficiles (être en contact avec ses émotions aussi négatives ou bouleversantes soient-elles sans être seul(e) mais au contraire accompagné humainement et dans le respect de ses possibles). Je chemine dans la difficile acceptation que ma pratique peut mettre en danger mon client ou moi-même même après le 11 mai – si nous n’avons pas de test nous permettant de savoir si nous avons eu ou pas le coronavirus.
Avec cette interrogation perturbante : y-aura-t-il un retour du toucher en peau à peau, sans gant, sans masque ? Une grippe, c’est saisonnier… Cela revient tous les ans sous une forme ou une autre… Dans le même temps, nous vivons des moments de solidarité et nous recréons des relations humaines – alors même que celles d’avant ne sont plus permises.
De l’absence ou la réduction du toucher, ressort quand même des mises en lien différentes : j’aime retrouver la famille de l’immeuble d’en face tous les jours à 20h – même si je préfèrerais les rencontrer en chair et en os, échanger des regards, des paroles…
Une belle expérience que je renouvelle cette semaine.
Réflexion autour des “achats de première nécessité”
J’ai en tête la pyramide de Maslow, qui, même si la hiérarchisation des besoins est remise en question, est, je trouve, toujours intéressante pour les regroupements qui sont faits et respectable dans sa tentative d’organisation.
Que sont ces objets “de premières nécessité” mentionnés dans les attestations de déplacement que nous pouvons aller acheter en boutique ? Que sont ces objets dans une société comme la nôtre : de la pâte à pizza, de la sauce tomate, des steaks pour faire des hamburgers, des oeufs de Pâques ?
Intellectuellement plutôt non.
Il est question d’objets de “première nécessité”. Pour quoi ? Pour se nourrir ? Pour permettre un semblant de normalité ? Pour recréer les événements qui rythment la vie “normale” ? Pour permettre aux entreprises de ne pas faire faillite tout en se faisant plaisir?
Alors qu’en ligne beaucoup d’articles restent accessibles : des commandes préparées par des être humains, livrés par des hommes et des femmes qui sont peut-être contents de pouvoir continuer à travailler mais qui, en même temps, prennent des risques pour des articles “de confort”. Acheter un purificateur d’air pour aider à respirer, oui, bien sûr ; mais un gaufrier ? Et un gaufrier “made in France” ? Essayons de faire de notre mieux, en conscience…
Comprendre le “pourquoi” et préparer “l’après”
J’ai fait avec ma famille un exercice sur le coronavirus : une page blanche, un petit virus dessiné au centre avec des flèches indiquant les causes et les conséquences puis ce que cela révèle et les points sur lesquels il va falloir travailler. J’ai essayé de ne pas trop imposer “mes sujets”. La conscience de vivre quelque chose d’historique est bien présente dans la famille. L’aspect humain du vécu l’est très peu alors qu’il aura forcément de conséquences. Une famille vivant dans un minuscule appartement avec des enfants en bas âge ; des parents en télétravail avec des enfants à qui faire l’école à la maison ; ceux qui doivent travailler et ceux qui ne peuvent plus travailler et dont les impayés s’accumulent, une famille avec des ados ravis de ne plus avoir à aller au collège/lycée qui se pensent en vacances… Et la mort présente dans les chiffres énumérés tous les soirs ou sous les traits de ce sympathique voisin ou de cette grand-mère adorée. Un vécu différent pour chacun qui laissera une empreinte personnelle…
Chez nous, ce sont plus les aspects logistiques et financiers qui ont émergés. Intéressant de voir nos complémentarités sur les sujets et en même temps, cela illustre bien les difficiles discussions pour déterminer les mesures qu’il faudra prendre sur le plan national et international. Quels critères de décision ? Court-terme, moyen-terme, long-terme ? Pondération de l’effet environnemental des décisions, de l’effet humain des décisions…
Je me réjouis du travail en cours par la Convention Citoyenne pour le climat qui a d’ailleurs publié une “contribution de la Convention Citoyenne pour le climat au plan de sortie de crise” et j’ai hâte de lire leurs conclusions. Je vois également avec intérêt des députés se saisir de l’après.
De cette semaine je garde la déconnexion aux réseaux sociaux et la lecture des “philosophie magazine”. Et vous ?
Marie-Laure